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Hippolyte Jean Giraudoux, né le à Bellac et mort le à Paris 7e, est un écrivain et un diplomate français.
Brillant étudiant et soldat décoré pendant la Première Guerre mondiale, il occupe des fonctions diplomatiques et administratives tout en écrivant des romans (Suzanne et le Pacifique en , Siegfried et le Limousin en ) avant de se diriger vers le théâtre après sa rencontre avec le comédien Louis Jouvet qui mettra en scène et interprétera ses œuvres principales.
Il est aujourd'hui surtout connu pour son théâtre qui compte des pièces célèbres comme Amphitryon 38 (1929), La Guerre de Troie n'aura pas lieu (1935), Électre (1937), Ondine (1939), ou encore La Folle de Chaillot jouée en 1945 après sa mort. Jean Giraudoux a participé comme d'autres dramaturges des années 1930-1940 (Cocteau, Anouilh, Sartre, Camus par exemple) à la réécriture des mythes antiques éclairés par les mentalités modernes. Il a su allier fantaisie poétique et goût pour les images insolites, et également associer le tragique et le léger dans une langue élégante et fine, parfois même poétique comme dans Intermezzo ou Ondine.
Germanophile et diplomate de carrière, il est commissaire général à l'information en 1939-1940 et pendant l'Occupation sa situation est complexe et son rôle contrasté.
Jean Giraudoux meurt à Paris en , à soixante et un ans, à la suite d'une intoxication alimentaire ou, selon une autre hypothèse, d'une inflammation du pancréas.
Fils cadet de Léger Giraudoux, employé des Ponts et chaussées, et d'Anne Lacoste, Jean Giraudoux naît à Bellac, un an avant la nomination de son père à Bessines. Ce dernier quitte le corps des Ponts et chaussées en 1890 pour devenir percepteur à Pellevoisin. Reçu premier du canton au certificat d'études en 1892, Jean Giraudoux entre en comme boursier au lycée de Châteauroux, qui porte aujourd'hui son nom (lycée Jean-Giraudoux), où il fait sa première communion en , et est interne jusqu'à son baccalauréat en 1900.
Bachelier de philosophie, il poursuit ses brillantes études en classes préparatoires au lycée Lakanal de Sceaux pour tenter le concours littéraire de l'École normale supérieure ; il termine sa seconde année de khâgne avec le prix d'excellence et obtient le premier prix de version grecque au concours général en 1902. Reçu 13e sur 21 à l'École normale supérieure de Paris, il accomplit son service militaire au 98e régiment d'infanterie à Roanne, Clermont-Ferrand et Lyon, dont il sort en 1903 avec le grade de caporal. Entré à l'École normale supérieure de la rue d'Ulm, dans la section lettres, il est passionné par la culture allemande. Après l'obtention, avec la mention « bien », de sa licence de lettres à la Sorbonne en , avec un mémoire sur les Odes pindariques de Ronsard, il passe, sur les conseils de son maître Charles Andler, dans la section d'allemand en novembre.
Ayant obtenu une bourse d'études, il s'inscrit alors à l'université de Munich. Durant l'été 1905, il est le répétiteur du fils du prince de Saxe et de Paul Morand à Munich, et il rencontre Frank Wedekind. Puis il part en voyage pour la Serbie, l'Autriche-Hongrie (Trieste entre autres) et Venise en Italie. En 1906, il obtient sa maîtrise et fait, durant l'été, un séjour linguistique en Allemagne. Après un échec à l'agrégation d'allemand, il se rend aux États-Unis, de à , avec une bourse pour l'université Harvard. En 1907-1908, il enseigne le français, donne des conférences et visite les États-Unis et le Canada. À son retour, il entre à la rédaction du Matin et prépare le concours des Affaires étrangères, auquel il échoue en 1909. La même année, il publie son premier livre, Provinciales, remarqué par André Gide. En , reçu premier au concours des chancelleries, il est nommé élève vice-consul à la direction politique et commerciale du ministère des Affaires étrangères ; il assure le convoiement de la valise diplomatique à Constantinople, Moscou, puis Vienne. Par ailleurs, il fait la connaissance de Rosalia Abreu, sœur de son ami Pierre, une jeune héritière cubaine, pour laquelle il éprouve une passion non partagée.
Promu attaché au bureau d'étude de la presse étrangère en , il devient vice-consul de 3e classe en 1913. La même année, il fait paraître chez Grasset L'École des indifférents et entame une liaison avec Suzanne Boland (1881-1969), mariée au commandant Paul Pineau, mais séparée de son mari.
Mobilisé comme sergent au 298e régiment d'infanterie en 1914, puis nommé sous-lieutenant, il a été blessé, le 16 septembre, dans l'Aisne (au nord-est de Vingré), lors de la contre-offensive qui a suivi la victoire de la Marne, aux Dardanelles en 1915, et nommé chevalier de la Légion d'honneur. Convalescent, il entre au bureau de la propagande du ministère des Affaires étrangères grâce à Philippe Berthelot, avant de participer à une mission militaire et diplomatique à Lisbonne en août-. Il prend part ensuite à la « mission Harvard », qui le conduit aux États-Unis en avril-.
Ce faisant, il continue d'écrire, faisant paraître Retour d'Alsace. Août 1914, en , Lectures pour une ombre, en , Amica America et Simon le pathétique, en .
Après la guerre, il s'éloigne de l'Allemagne. Démobilisé en 1919, il devient secrétaire d'ambassade de troisième classe et dirige le Service des œuvres françaises à l'étranger (1920) puis le service d'information et de presse au quai d'Orsay (fin ). Au Quai d'Orsay il rejoint un de ses amis d'enfance, le diplomate Philippe Berthelot.
Suzanne Boland lui donne un fils, Jean-Pierre, le . Ils se marieront en 1921, Suzanne ayant divorcé l'année précédente. La même année paraît Suzanne et le Pacifique, roman suivi en par Siegfried et le Limousin, qui se voit décerner le prix Balzac, et en par Juliette au pays des hommes. En 1926, il est promu officier de la Légion d'honneur.
En 1927, il se fait placer hors cadre à la disposition de la Commission d'évaluation des dommages alliés en Turquie, commission où il reste sept ans. Ce poste lui laissant beaucoup de temps libre, il en profite pour écrire un roman, Églantine, s'inspirant du financier juif, Léonard Rosenthal et ses premières pièces de théâtre. La rencontre avec Louis Jouvet en juin 1927 par l'entremise de Bernard Zimmer stimule en effet sa création théâtrale avec le succès de Siegfried (), adaptation théâtrale de son roman Siegfried et le Limousin, d’Amphitryon 38 () et d’Intermezzo (), malgré l'échec de Judith ().
À la fin de 1931, il entame une liaison avec Anita de Madero, qui s'achève en 1936 par le départ de la jeune héritière argentine qui part se marier en Amérique du Sud.
En , il est chargé de mission au cabinet d'Édouard Herriot, président du Conseil, qu'il accompagne lors de la conférence de Lausanne. La même année, il écrit la préface de la traduction du livre de l'écrivaine germanophone d'origine messine Adrienne Thomas, Catherine Soldat.
En 1934, il est nommé inspecteur général des postes diplomatiques et consulaires. Au moment où l'horizon de l'Europe s'assombrit, il écrit la pièce La Guerre de Troie n'aura pas lieu, plaidoyer désespéré en faveur de la paix, et par-delà ce contexte, Giraudoux y dénonce la complicité entre l'art et la guerre. Il montre que la « nécessité » ou le « destin », souvent invoqués par les gouvernants pour imposer leur décision, constituent une dangereuse fiction. En 1936, Jean Zay lui propose la direction de la Comédie-Française, mais il la refuse. La même année, il devient commandeur de la Légion d'honneur.
Le , il rencontre dans un studio de la radio, lors d'un entretien sur Ondine, Isabelle Montérou (1904-1988), jeune journaliste avec laquelle il entame une liaison qui dure jusqu'en .
À la veille de la guerre, il publie un important essai politique, recueil d'articles et de conférences : Pleins pouvoirs (Gallimard, ), dans lequel, prenant modèle sur les États-Unis, il demande notamment l'adoption d'une politique d'immigration, afin, non « d’obtenir dans son intégrité, par l’épuration, un type physique primitif, mais de constituer, au besoin avec des apports étrangers, un type moral et culturel. » Sa préférence va à « une immigration scandinave éminemment souhaitable », à l'exclusion de « ces races primitives ou imperméables dont les civilisations, par leur médiocrité ou leur caractère exclusif, ne peuvent donner que des amalgames lamentables », symbolisées selon lui par les Arabes.
Devant la montée des périls, Giraudoux s'engage en politique. Lors du remaniement ministériel du , il est nommé par Édouard Daladier Commissaire général à l'information et prononce ses Messages du Continental, contre la guerre hitlérienne.
Le , lors de la formation de son gouvernement, Paul Reynaud le remplace par Ludovic-Oscar Frossard, nommé ministre de l'Information, et il devient président d'un « Conseil supérieur de l'information ».
Durant la débâcle de juin 1940, il suit le gouvernement à Bordeaux, avant de s'installer auprès de sa mère à Vichy. En janvier 1941, il part à la retraite et commence deux écrits inspirés par la défaite, qui ne paraîtront qu'après sa mort, le second étant resté inachevé : Armistice à Bordeaux , et Sans Pouvoirs , édités l'un et l'autre à Monaco.
Commissaire général à l'information sous Daladier, sa situation pendant l'Occupation est complexe et son rôle contrasté :
Sa participation à la lutte contre l'occupation allemande au sein de la Résistance reste encore débattue,. En , il aurait projeté de « participer à sa façon à la Résistance ».
Il poursuit ses travaux littéraires avec L'Apollon de Bellac, Sodome et Gomorrhe et La Folle de Chaillot et, devenu directeur littéraire chez Gaumont, participe à des adaptations cinématographiques, qu'il s'agisse de La Duchesse de Langeais de Balzac pour le film homonyme de Jacques de Baroncelli ou Les Anges du péché pour Robert Bresson.
Après la mort de sa mère en 1943, sa santé se dégrade. Jean Giraudoux meurt le au 89, quai d'Orsay, à l'âge de soixante et un ans, à la suite d’une crise d'urémie selon la version officielle, mais, plus probablement, d’une pancréatite. Un vibrant hommage est rendu au « grand Français » par Comœdia, journal dont le directeur fréquentait les autorités d'occupation.
Quelques jours après son inhumation, qui a lieu le dans un caveau provisoire du cimetière de Montmartre, Claude Roy fait courir le bruit, au café de Flore, qu'il a été empoisonné par la Gestapo. Louis Aragon le reprend à son compte dans Ce soir le : « Pourquoi ? Pas seulement parce que c’est le plus français de nos écrivains, mais certainement aussi pour son activité résistante gardée très secrète et que, pour ma part, j’avais devinée durant le dernier entretien que je devais avoir avec lui cinq jours avant sa mort ». Une biographie explorant la question lui est consacrée par Jacques Body en 2004.
Il est inhumé au cimetière de Passy à Paris, son fils souhaitant l'éloigner de la proximité de Sacha Guitry à Montmartre.
Se fondant sur plusieurs citations tirées du chapitre « La France peuplée » de Pleins pouvoirs, voire, dans certains cas, sur des extraits de répliques d'Holopherne dans Judith, plusieurs auteurs considèrent que Giraudoux était antisémite,,,,,,,,, et raciste,,. Spécialiste de Sartre, Jean-François Louette juge ainsi que Giraudoux « évoque maints problèmes » dans Pleins pouvoirs, mais que « l'essentiel aujourd'hui semble le chapitre intitulé La France peuplée », dont il stigmatise la « violence raciste ». Pour Jean-Claude Milner, « le Giraudoux raciste et le Giraudoux républicain ne parviennent pas à se détacher ». Daniel Salvatore Schiffer juge, quant à lui, que, dans Pleins pouvoirs, Giraudoux est « non loin [...] de l'antisémitisme de Fichte ou Hegel ». Aux yeux de Claude Liauzu, Giraudoux a donné des connotations positives au mot « raciste », dans le cadre d'une banalisation du racisme, dans les années trente. Selon Pierre Vidal-Naquet, de même, le racisme de Giraudoux, en 1939, est prodigieusement banal.
Pour André Job, « l'antisémitisme, c'est d'abord, à n'en pas douter, une façon de ne pas résister au plaisir d'un « bon mot », si malveillant soit-il », usage auquel il est arrivé à Giraudoux de sacrifier, « sans que les exemples soient en assez grand nombre pour qu'on puisse les juger vraiment significatifs ».
Alain Duneau parle de « défaillances », considérant que « deux pages de Pleins pouvoirs lui ont été à juste titre reprochées, mais sans lucidité particulière, par des professeurs de vertu qui ne s'interrogent peut-être pas assez sur eux-mêmes ou sur les illusions rassurantes mais criminelles dont d'autres se sont bercés ». À ses yeux, « ces deux pages trop connues pourraient bien être le fruit de l'appréhension d'un retour de la guerre », et il signale que « tout mot « raciste » a disparu chez lui dès que la guerre — réelle — a été déclarée ». Toujours selon lui, la répulsion de Giraudoux à l'égard de toute forme de laideur, « sans doute ressentie comme une forme du mal », peut également « expliquer en partie certaines de ses faiblesses […] qui lui [ont] été abondamment reprochée[s] (accusations injustifiées de racisme) ».
Pour son biographe Jacques Body, « Giraudoux antisémite, Giraudoux vichyste, c’est devenu l’antienne des ignorants. » Selon lui, de Pleins pouvoirs, « son plaidoyer pour une politique d’immigration et pour le droit d’asile », on a fait, « cinquante ans plus tard, un bréviaire xénophobe et raciste, à coup de citations tronquées ». Il considère que, chez Giraudoux, « l'appartenance à une patrie marque un homme, mais par la culture, non par des contraintes naturelles ou sociologiques. Giraudoux croit à la patrie, pas à la race ».
Pierre Charreton, de son côté, relève que, si Giraudoux défend l'avènement d'une « politique raciale » et d'un « ministère de la race », pour lui, le terme de « race », « aujourd'hui empoisonné, voire tabou », mais « employé sans précaution jusqu'au milieu du siècle, parfois certes dans un sens proprement raciste, mais aussi dans une acception proche du terme "peuple" », renvoie à un « habitus », un ensemble de valeurs et de comportements partagés sur un territoire, et non à une référence ethnique. Giraudoux, rappelle-t-il, défend l'idée que « la race française est une race composée. […] Il n'y a pas que le Français qui naît. Il y a le Français qu'on fait. » Le but d'une « politique raciale », selon lui, n'est pas de retrouver un « type physique primitif », mais de « constituer, au besoin avec des apports étrangers, un type moral et culturel ». De même, il relève que l'auteur éprouve un « choc désagréable » en découvrant sur une pancarte ou une affiche l'inscription : « La France aux Français », jugeant que cette phrase, au lieu de « l'enrichir le dépossède, ».
Sur le style de Giraudoux :
« Je n’ai pas rencontré souvent Jean Giraudoux, deux ou trois fois peut-être. Ce jeune visage sérieux d’étudiant, cette façon de s’exprimer, brillante et souriante, m’ont enchanté comme ses livres, ou ses pièces. Je découvris qu’il parlait comme il écrivait, de façon moins ornée, sans doute, mais profondément identique, c’est-à-dire que sa manière d’écrire lui était parfaitement naturelle. Aucun être sans doute ne m’a paru avoir une conversation plus aisée et plus magique, avec ses phrases légères, son français pur, ses images nécessaires. »
— Robert Brasillach (1941), Notre avant-guerre
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Source : Article Jean Giraudoux de WikipédiaContributeurs : voir la liste
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